Réflexions | Comment réduire l’impact du conditionnement des câbles sur la production de CO2 ?

Pourquoi le conditionnement des produits, longtemps considéré comme « négligeable », et donc négligé, est désormais au cœur de nombreuses réflexions ? Parce qu’il joue un rôle devenu central en matière d’environnement et d’économie(s). Et que s’y intéresser d’un peu plus près, permet d’améliorer la conservation de la qualité des produits, leur reconnaissance, leur utilisation, leur transport, leur stockage. Et par voie de conséquence, d’agir concrètement pour atténuer les émissions de dioxyde de carbone (CO2), tout en limitant les déchets, la consommation d’énergie et de matières.

Dans l’industrie câblière, réfléchir au conditionnement et à son impact sur la production de C02 consiste en premier lieu à se familiariser avec le support incontournable qu’est le touret (ou la bobine), puis à investiguer le sujet des palettes et conteneurs, pour ensuite envisager une évaluation et enfin des axes de réduction.

Alors, pour commencer, qu’est-ce qu’un touret de câble ?

C’est un dévidoir en forme de tambour utilisé pour la fabrication et le transport des câbles. Vous le connaissez bien : il est désormais entré dans nos foyers pour finir ses jours comme bar d’appoint, table de salon ou de jardin. C’est qu’il en porte et en parcoure des km au cours de sa vie un touret !

Un touret se caractérise par :

  • Ses joues, définies par le diamètre ⌀ D1 : les disques en base et sommet du touret, parfois cerclés de métal pour les protéger lors des roulages au sol.
  • Le fut, tambour, ou baril défini par le ⌀ d : la zone sur laquelle le câble est enroulé. Pour les câbles fibre optique, le ⌀ d doit être > à 50 fois le ⌀ du câble pour limiter son vieillissement lors du stockage.
  • La largeur d’enroulement utile, Lu, et la largeur totale
  • La garde au sol : la hauteur entre le câble enroulé sur le touret et le haut de la joue. Elle assure l’intégrité du câble durant le transport du touret.
  • Le ⌀ de l’axe, A : le trou qui permet le passage d’un axe pour enrouler et dérouler le câble. Il est souvent associé à une autre évasure sur la joue pour entrainer le touret sur les machines d’enroulement en câbleries.

Associées à des tables précisant le ⌀ du câble et le touret utilisé, ces caractéristiques permettent de calculer les longueurs max. de câble pouvant s’embobiner sur un touret.

Matières utilisées pour la fabrication des tourets de câble

On trouve des tourets en bois en contreplaqué en métal et en plastique. Le choix s’effectue en fonction de leur :

  • résistance mécanique en fonction du câble conditionné
  • réutilisation possible : tous sont recyclables dès lors que leurs matériaux sont séparés. Certains câbliers consignent leurs tourets et organisent leur rapatriement.
  • coût
  • et destination : les tourets métal et plastique sont utilisés en interne des câbleries. Les tourets bois moins chers sont employés pour le transport vers les clients. Ainsi que les bobines plastiques pour les petits câbles car, disposées dans des boites en carton, elles autorisent le déroulement du câble à partir de la boite (Reel in Box).

Très souvent les tourets bois sont, en bois traités, aux normes internationales sanitaires (NIMP15) et répondent à la directive européenne 2004/102/CE.

Les tourets de câbles intérieurs sont stockés sous abris. Pour les tourets stockés à l’extérieur, il faut impérativement prévoir une protection thermique cerclée contre les excursions de température : un câble de gaine noire stocké à l’extérieur peut atteindre 80°C en surface même sur un parc situé dans le nord de la France !

En outre, lors de transports mondiaux par bateau, certains reçoivent un douvage -une couverture de bois cerclée de métal- pour les protéger de dommages lors de la manutention. Par ailleurs, les grands tourets sont toujours disposés debout sur les joues : sur palette lors de trajets en container ou coincés avec des cales sur remorques, pour prévenir tout mouvement.

Par-contre les tourets ou bobines contreplaqués de petits câbles (⌀ < 8 mm) sont stockés couchés, pour en disposer plusieurs sur palette : jusqu’à 1,20m de haut. Un film de protection les enserre pour éviter le déspirage lié aux vibrations du transport. Les bobines peuvent aussi être encartonnées pour encore mieux protéger le câble et filmées avec la palette. Dans ce cas, la garde est réduite au minimum : 3 à 5 fois le ⌀ du câble.

La norme NF C30-300 de juin 1995 « Règle de l’art sur le conditionnement, le stockage et la manutention des câbles (…) dans les parcs et dépôts » est le document de référence. N’hésitez pas à la compulser pour vous informer plus avant à ce sujet.

Ceci étant dit, penchons-nous désormais sur le transport de ces tourets.

Transporter des tourets de câble

Que ce soit par voies maritime ou routière, les tourets voyagent principalement sur palette.

Ces palettes, indispensables au transport, sont peu ou prou standardisées. Les plus communes sont :

  • La palette universelle, palette ISO ou US [1200 x 1000 mm] utilisée sur le marché nord-américain ainsi qu’au Japon, elle ne s’adapte pas aux camions européens
  • La palette EPAL ou EUR [1200 x 800 x 145 mm] commercialisée sur l’ensemble du territoire européen, elle est conçue pour servir plusieurs fois et donc réduire les déchets d’emballage
  • La palette CP comprenant 9 catégories de palettes (CP1 à CP9) de différentes dimensions, elle peut être réparée et réutilisée plusieurs fois.

Une fois sur palette, les tourets qui doivent naviguer sont ensuite placés en containers. Ces containers maritimes se conforment aux normes ISO 668 et 1496 et sont de types :

  • « Dry » (ST) ou fermés : ce sont les plus utilisés dans le monde de la câblerie. Ils font 6 ou 12 m de long et existent en 2 hauteurs, standard ou High Cube. Leurs dimensions intérieures minimales sont de 2350 mm en largeur et 2390 mm en hauteur. Quant aux portes elles font en général 2340 mm de large et 2280 mm de haut.
  • « Open Top » (OT), sans toit métallique, parfois équipés de bâches sur le dessus
  • « Open Side » (OS) avec une ou deux parties latérales en bâche, ou métallique mais qui s’ouvre complètement
  • «Reefer » (RF) ou frigo : hermétiques, avec isolation thermique et équipés d’un moteur électrique

Outre la dimension des palettes et containers, 3 autres éléments sont à considérer :

  • La gerbabilité : terme consacré pour définir que les palettes sont empilables, à vide ou pleines.
  • Les palettes en bois conviennent dans la majorité des cas, mais exclusivement avec des palettes à la norme NIMP15 – ISPM n°15 imposant un traitement aux matériaux d’emballage à base de bois.
  • La hauteur maximum : qui est très souvent fixée à 1200 mm. Mais cette dimension est aussi liée à la hauteur disponible des entrepôts du destinataire.
  • Et le poids supporté par les palettes et les camions, même si les réglementations européennes et locales sont loin d’être unifiées.

A ce sujet, et à titre d’exemple, prenons un semi-remorque dont le PTAC est de 38 tonnes, le poids à vide de 6,6 tonnes, ayant pour dimensions intérieures 13,62m de long, 2,48m de large.
Il rentre 33 palettes EU au sol, soit 66 palettes gerbables pour une hauteur maximum de 1,20m.
Aujourd’hui nombre de fabricants placent donc 24 bobines de 500m de câble de branchement sur palette EU (1200x800x1200) gerbable, soit 12 km de câbles.
En sachant qu’une bobine de 500m pèse 15 kg et qu’une palette EU vide pèse 25 kg, la palette chargée pèse 15 x 24 + 25 = 385 kg. Un camion semi-remorque dont le PTAC est de 38 tonnes peut ainsi transporter 66×24 = 1584 km de câble pour un poids de 25,4 tonnes.

Nous venons de passer en revue les différents types de conditionnement et de transports des câbles. Appréhendons désormais la question de l’impact de ces diverses solutions et la méthode la plus reconnue actuellement pour la mesurer.

L’outil le plus abouti en termes d’évaluation des impacts environnementaux est l’Analyse des Cycles de Vie des produits. Sa fiabilité s’appuie sur :

  • Sa normalisation : norme ISO (14040 à 14043), l’ACV est fondé sur une méthodologie et une déontologie harmonisées, lui conférant une vraie robustesse dans ses résultats.
  • Une approche « cycle de vie » : l’ACV est un inventaire exhaustif des flux tout au long de la vie du produit. De l’extraction des matières premières nécessaires à la fabrication du produit, à sa distribution, son utilisation, les phases de transport et jusqu’à son élimination vers les filières de fin de vie.
  • Une approche multicritères : l’ACV est bâtie sur plusieurs critères d’analyse des « intrants », des « extrants » et des impacts environnementaux potentiels du système du produit.

Exemple.

Considérons un câble à fibre optique dont la fonction -définie par PEPecopassport- est de « transmettre un signal de communication sur 1m, à une longueur d’onde de 1310 nm pour une fibre optique monomode pendant 20 ans à un taux d’utilisation de 100% en conformité avec les normes en vigueur ». Un grand nombre de fibres dans un câble va influer favorablement sur le calcul d’impact. C’est pourquoi sur un réseau FTTH l’attention est portée sur les câbles de branchement -comportant peu de fibres- mais qui en revanche, étant légers jouent aussi positivement sur l’impact conditionnement et transport.

Alors, quels axes de réduction du CO2 ?

  • le lieu de fabrication : au plus il est proche du lieu d’utilisation au mieux c’est. À nuancer toutefois selon les configurations logistiques utilisées pour le transport et le CO2 émis par km parcouru par kg de produit.
  • Le lieu de sourcing des matières premières est important, mais négligeable dans notre cas, du fait de la faible masse de matière première et des volumes entrant dans les unités de fabrication.
  • le mix énergétique : selon que du charbon, du gaz ou du nucléaire sont utilisés pour transformer les matières plastiques, les émissions de CO2 ramené au produit sont aussi différentes.
  • le conditionnement : tout l’enjeu ici est de maximiser les longueurs transportées, ramené à l’unité de longueur de fibre. Et notamment, de choisir les bonnes dimensions de palette pour optimiser le chargement des moyens de transport utilisés. Sans oublier le calcul optimum de la bobine 🧵.

Ainsi, ces dernières années, les fabricants ont travaillé le conditionnement pour passer de 6 km de câbles de branchement en touret de 500m à 12 km, associé à une réduction du poids individuel.

Ce panorama était l’occasion de creuser différentes pistes concernant la réduction de CO2. Ceci étant il ne faut pas oublier qu’en matière d’environnement, la chasse au kg de CO2 n’est pas tout et quelle ne nous dispense pas d’une réelle réflexion sur la sobriété énergétique, à laquelle l’industrie doit aussi contribuer.

 

 

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